Edition 2014 © Photo G. Bret

Merci à Jehanne Vion pour ce très bel article publié dans la dernière newsletter du Mouvement d’Art Thérapeutes (M.A.T.).
Jehanne s’occupe de la fresque créée principalement par les enfants pendant « Une fleur, une vie ».


UNE FLEUR, UNE VIE, UNE FRESQUE

Le  9 mai 2015, a eu lieu la 3ème édition de l’évènement : Une fleur, Une vie. Cette belle journée est organisée par un collectif d’associations qui soutiennent les parents ayant perdu un bébé pendant la grossesse ou dans l’année suivant la naissance. Une journée pour parler et communiquer autour du deuil périnatal aux instances, au grand public, pour lever les tabous, délier les langues et se faire connaitre des familles endeuillées. Cette journée s’inscrit dans une démarche sociétale et est aussi importante dans l’individualité et la particularité de chaque parent, de chaque famille.

Comment partager cette douleur tellement peu reconnue et taboue alors qu’il n’y a pas de mot pour désigner un parent qui a perdu un enfant ? Des mots justement, c’était la proposition d’Une fleur Une vie cette année : mettons des mots sur les maux, sur les pleurs, sur la vie qui continue. Des groupes de paroles ont complété le travail des « écoutantes » présentes sur l’évènement. Cette journée est rythmée par le geste symbolique de déposer une fleur et un prénom pour composer une œuvre éphémère.

 

Plus qu’une animation, un accompagnement …

C’est tout près du bouquet, que depuis 2 ans j’invite les personnes à participer à la création d’une fresque. Feutres, peinture, rubans, coquillages, anges, papillons et 4 m de toile… sont à disposition.

Le but premier était de créer une « animation »  pour que les parents aient un sas entre le recueillement près du bouquet et le retour à la vie. L’année passée d’autres art-thérapeutes proposaient des ateliers au cours de la journée, j’étais comme un fil conducteur entre le bouquet et leur proposition.

Mais cette année le thème était la parole et des groupes d’échanges étaient organisés au cours de la journée. Je me suis demandée si mon rôle était de proposer une fresque de mots ? Ou « si les mots ne viennent pas … » il y a le dessin, la couleur … Mais Face aux parents endeuillés il est devenu évident que ma proposition pour mobiliser leur l’élan créatif, était de déposer une « trace ».

Car c’est bien de trace dont il s’agit. Les traces physiques que cet enfant parti trop tôt n’a pas laissées. Ces bébés vite oubliés par le reste du monde parce qu’ils sont « mort avant de n’Être » (avant de pouvoir laisser ses traces). Et pourtant quelles traces les parents endeuillés portent en eux sans pouvoir les partager !

De trace en trace, les couleurs, les mots, les mouvements trouvent place, s’entremêlent. Ce n’est plus la douleur individuelle qui ap-parait mais un ensemble touchant et solidaire. La fresque laisse une trace année après année. Elle est un complément du geste symbolique de déposer une fleur dans un bouquet éphémère et des mots dans un groupe de parole. L’œuvre de 2014, était exposée cette année et de nombreux parents et enfants sont allés chercher leur trace et ont regardé avec bonheur la création commune montrée à tous.

 

Créer, vivre, ensemble …

La création commune permet un échange différent qui sort des mots et des blessures. Recréer de l’être-avec pour se recréer en tant que parent, enfant. Autour de la fresque cette année comme l’année passée, j’ai pu observer des familles créant ensemble, un même dessin, ou côte à côte. Des couples, des enfants avec leur parent, des parents avec leurs parents … Même si les adultes sont souvent plus timides face aux pinceaux, les enfants leur montrent la voie. Et c’est dans une attention conjointe qu’ils admirent chacun ce que l’autre à fait. Le regard peut se porter sur la création et de nouveau sur l’autre, sur soi. Le moment présent peut se vivre ensemble…

Et si lors de ce moment précieux nous pouvons saisir la force positive qui se dégage, alors une transformation de la douleur peut s’opérer. J’ai essayé de restituer aux familles au fur et à mesure ce que je recueillais comme un cadeau qu’elles se faisaient. Une photo, un regard, une parole, une ouverture aux possibles …

En plus d’une animation créant un sas entre le bouquet et le quotidien, ce fut un accompagnement de chaque personne pour renouer avec sa créativité mis à mal dans le deuil périnatal. Pour certains cet espace a pu ouvrir une fenêtre ou soutenir une nouvelle possibilité de vivre.

Retrouvez cet article sur le site : www.le-mat.net

No comments so far.

Laisser un commentaire

Your email address will not be published. Website Field Is Optional