« UNE FLEUR, UNE VIE » ÉDITION 2018 – à lire en ligne sur le blog “Petits pots et mojitos”
Lorsque nous avons perdu notre bébé en Mai 2011 et avons été confronté à ce que l’on nomme pudiquement « le deuil périnatal », j’ai été frappée de constater que bien peu d’initiatives existaient en France. J’ai consulté un ou deux forums puis très vite ai construit une forteresse autour de mon chagrin, reprenant l’écriture comme exutoire.
En 2013, j’ai découvert au détour d’une recherche sur Internet la merveilleuse initiative du collectif « Une fleur, une vie » et bien que depuis la première édition je n’ai pas eu l’occasion d’y participer, je m’y intéresse chaque année, partageant leurs publications et surtout contribuant à l’immense bouquet avec une fleur au nom de mon ange.
Cette année, j’ai décidé d’oser et de demander une interview à Elisabeth Martineau, coordinatrice du projet. A ma grande surprise, elle a accepté… C’est donc avec joie et émotion que je vous propose d’en savoir plus sur cette journée si symbolique pour les parents endeuillés et leurs proches.
Une-Fleur-une-vie
Tout d’abord, pouvez-vous nous présenter le projet « Une fleur, une vie »?
Il s’agit d’un événement artistique d’accompagnement et de soutien aux parents, grands-parents, proches touchés par un deuil périnatal qui a lieu pour la 6ème année consécutive au mois de Mai à Paris. Au Québec, le sujet n’est pas tabou comme en France, il est intégré à la vie. Lors de la journée de sensibilisation au deuil périnatal ayant lieu le 15 Octobre, de nombreux libraires mettent en avant des ouvrages sur le sujet. Des initiatives sont prises, y compris au niveau gouvernemental afin d’accompagner et de faire connaître ce deuil si particulier, un peu à la manière d’Octobre Rose qui bénéficie d’une mobilisation et de nombreux projets. Le collectif est composée de quatre associations: AGAPA, ESNPE, Naître et Vivre et Spama.
Comment vous est venue l’idée de cette journée ?
J’ai publié en 2008 un livre consacré au deuil périnatal ce qui m’a donné l’occasion de contacter différentes associations, de rencontrer des professionnels et de recueillir des témoignages. Nous étions une trentaine de personnes lors d’une réunion à Paris en Octobre 2011 dont des membres d’associations (françaises, belges et suisses) principalement, mais aussi des psychologues et auteurs. Nous avons réfléchi aux moyens de sensibiliser, de former des bénévoles à l’écoute,de collecter des fonds et surtout de trouver une façon de parler de ce deuil méconnu sans faire peur.L’idée du bouquet est née à la fin de cette réunion pour envisager un projet commun fort du travail de plusieurs associations, et toucher le grand public, mais il a fallu plus de deux ans de réflexion et de préparation avant la réalisation de la première édition.
C’était une belle journée ensoleillée et l’idée d’un immense bouquet devant la Tour Eiffel est apparue. A cette époque, les flash mobs émergeaient, nous avons donc songé à faire la même chose mais cela nécessitait une grande organisation, obtenir l’accord de la ville de Paris etc. C’est en obtenant une subvention de la Fondation des Services Funéraires que le 1er événement a vu le jour en 2013 à la Mairie du 14ème arrondissement puis à la Mairie du 15ème arrondissement depuis 2014.
Comment se déroule cette journée ?
Le bouquet de fleurs constitué n’a jamais la même forme, cela varie chaque année. Le symbole des fleurs est important, cela représente du vivant, de la poésie, une démarche artistique. La journée est très riche en émotions mais c’est au moment du bouquet qu’elle atteint son paroxysme.
En premier lieu,les participants sont accueillis puis viennent récupérer le ticket pour obtenir leur fleur, vient ensuite le moment du bouquet. Des écoutants sont présents pour accompagner les gens et leurs familles s’ils en ressentent le besoin. C’est un moment très intense, une espèce de rituel où l’on « honore ses touts-petits », on enracine son chagrin, « on ancre sa tristesse à cet endroit » comme l’a si justement dit une internaute sur notre page Facebook. On rend hommage à ce bébé en acceptant de s’en détacher, cela se rapproche un peu des rituels d’obsèques où l’on laisse partir cet enfant, lui à sa place, nous à la nôtre, où qu’elle soit.
Après cette étape du bouquet, les participants peuvent participer en intérieur à des ateliers créatifs tels que origamis,scrapbooking, couture de coeurs et cette année, un atelier permettra de constituer un bracelet de perles en langue morse pour écrire le prénom de son bébé par exemple.
Sur le parvis se trouvent également deux barnums, les stands des associations, une buvette ainsi qu’un panneau des petits noms en forme du logo « Une fleur, une vie« .
L’idée est de construire ensemble au cours de cette journée.
A 14h30 se tient une conférence, cette année le thème est « se re-construire après la mort de son tout-petit ».
Cette journée est placée sous le signe de la bienveillance, la présence et l’accompagnement, le but étant que les participants ne repartent pas moins bien que lorsqu’ils sont arrivés. De nombreuses personnes reviennent tous les ans, nous sommes heureux de nous retrouver, ce sont nos enfants qui nous rassemblent. Cette année, une participante viendra du Sénégal exprès pour l’occasion !
Pour les gens n’ayant pas la possibilité de se rendre à Paris le 5 Mai ou souhaitant tout simplement rendre hommage à un tout-petit disparu, vous pouvez commander une fleur, ou plusieurs et elles seront déposées au sein du bouquet.
Si l’on souhaite vous rejoindre et devenir bénévoles, comment faire ?
Chaque association membre du collectif a ses spécificités, il faut contacter une association, une formation à l’écoute sera proposée mais il faut surtout avoir pris de la distance avec ce qu’on a vécu, ne pas raconter son histoire à soi. On peut également être bénévole sur un autre plan, toutes les formes d’aide sont les bienvenues.
Pour conclure, vous êtes également rédactrice en chef et gérante du magazine « L’enfant et la vie« , pouvez-vous nous en dire quelques mots ?
Il s’agit d’un magazine trimestriel crée en 1969, consacré aux parents, enfants et adolescents. C’est un magazine indépendant, sans publicités, présentant les sujets abordés habituellement sous un angle original. En effet, dans les années 70, peu de revues étaient consacrées au portage, à l’accouchement physiologique etc. On retrouve la philosophie de Maria Montessori dans la façon d’éveiller la conscience des enfants par exemple.
Je tenais à remercier du fond du coeur Elisabeth Martineau pour le temps qu’elle m’a accordé. « Une fleur, une vie » est une initiative fabuleuse qui a pour mérite d’accompagner et de rendre un tant soi peu poétique le deuil périnatal en rassemblant autour de cet immense bouquet de fleurs.
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